Mont’e Prama dans la littérature

Pour en savoir plus, voici quelques extraits de publications scientifiques ayant tenté d’interpréter les héros du Mont’e Prama. « Les iconographies de pugilistes, d’archers et de guerriers, répliquées plusieurs fois de manière sensiblement identique \[…] constituent un signe fort marquant profondément le territoire, à travers l’ostentation des valeurs reconnues par les communautés dont les familles éminentes ont été inhumées au Mont’e Prama, dans ce que nous pouvons définir un Hérôon » (Bedini-Tronchetti et alii 2012, p. 19).
« L’hérôon du Mont’e Prama représente la nouveauté archéologique la plus intéressante de ces dernières décennies concernant l’histoire de la Sardaigne et de la Méditerranée occidentale des premiers siècles du premier millénaire av. J.-C. \[…] Dans l’état actuel des fouilles, qui seront par la suite complétées, l’hérôon mesure environ 50 mètres, les statues sont placées sur les dalles funéraires et de nombreux bétyles et maquettes de nuragues sur le côté et derrière elles. Il s’agit de la monumentalisation, dans sa dernière phase d’utilisation, d’un cimetière remontant au IXe siècle av. J.-C. \[…] Carlo Tronchetti analyse la société de l’âge du Fer et associe l’émergence des « aristocraties » à la construction de l’hérôon. La société aristocratique vivait dans des maisons de plusieurs pièces donnant sur une cour centrale, dans des villages qui se sont transformés en centres proto-urbains et avaient atteint des conditions économiques de richesse relative » (Bedini-Tronchetti et alii 2012, pp. 10-11).
« Une nécropole que la communauté veut monumentale dans sa structure et extraordinaire dans son appareil figuratif qui semble reproduire sous une forme héroïque et emphatique les sujets auxquels la nécropole est dédiée : des statues d’hommes jeunes, armés et vigoureux, des frères d’armes, en hommage et en défense de leurs frères et sœurs morts et inhumés pour toujours dans le sol du Mont’e Prama » (Minoja 2014, p. 367).
« Mais c’est surtout l’ensemble des sépultures individuelles de Mont’e Prama-Cabras, transformé en hérôon, qui prouve le grand tournant politique et social, le changement profond des structures nuragiques qui s’est opéré dans la phase IV » (Lilliu 2004, p. 497).
« Dialectiquement, la destruction violente de l’hérôon pourrait correspondre au point de transformation de l’emporion en polis \[…]. L’hérôon devait être considéré comme un monument de « gloire » dynastique \[…] On ne sait pas aujourd’hui quand ce renversement a eu lieu. Les fosses, destinées à l’origine aux restes des « princes-héros », contenaient également un sceau scaraboïde et des perles en pâte de verre \[…] » (Lilliu 2004, pp. 635-636).


Une nécropole-sanctuaire dédiée au culte des héros

« Selon la vision traditionnelle, un groupe familial éminent des communautés de l’âge du Fer peuplant la région du Sinis aurait été inhumé au Mont’e Prama dans une espèce de Hérôon monumentalisé à l’intérieur de tombes individuelles et avec des sêmataprestigieux figurés dans l’idéologie héroïque ; mais l’attestation d’éléments architecturaux tels que des chapiteaux de colonnes et de piliers indiquerait plutôt l’existence d’un sanctuaire complexe où devaient se trouver le mobilier et les sculptures ; la nécropole ne serait qu’une partie de la zone du sanctuaire.
Cette partie est liée au culte des ancêtres : ces héros, peut-être déjà déifiés, dont descendent les groupes nobles inhumés dans les tombes ; des ancêtres, auxquels font référence les personnages gravés dans la pierre, mais aussi le culte du nurague, documenté par les nombreuses maquettes en pierre dont les groupes nobles tirent leur légitimité et leur pouvoir. On peut lire dans les sculptures un programme qui, en reliant le monde mythique et les ancêtres au monde physique du présent et de ses aristoï, célèbre la cosmologie particulière du pouvoir » (Bernardini 2014, p. 157).
« C’est dans ce cadre que retombe mon interprétation du phénomène de Mont’e Prama : il peut être envisagé comme un type particulier de nécropole dans laquelle un clan familial est glorifié, un groupe aristocratique se qualifiant avec des signes d’arété militaire et de religion, lié à un âge d’or révolu \[…] les tombes des ancêtres héroïsés, les bétyles qui ont été prélevés de certaines de ces tombes ; en effet, ils sont plus anciens et sculptés dans un matériau différent » (Tronchetti 2012a, pp. 181-192).
« À la lumière de ces réflexions, Tronchetti conclut que la nécropole du Mont’e Prama ne peut être considérée comme une simple zone à vocation funéraire, mais bel et bien comme une espèce de nécropole-sanctuaire où l’on célébrait le culte des ancêtres en même temps que le renouveau du pouvoir des aristocraties du VIIIe siècle av. J.-C. C’est dans ce contexte que le terme hérôon est introduit : le Mont’e Prama est la tombe des héros du présent, du culte et de la vénération des héros du passé » (Bernardini 2015, p. 53).
« Il est dommage que les fouilles récentes n’aient pas permis de préciser la nature exacte, la forme et la constitution complètes d’un hérôon transformé en temple, qui devait être parmi les plus grands et les plus célèbres de l’Antiquité protohistorique sarde \[…] » (Lilliu 1980, p. 118).
